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mercredi 22 mars 2006

CPE les nervis du système reprennent du service

Mercredi, 22 Mars 2006
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CPE les nervis du système reprennent du service

Philippe Delbauvre

Politique
CPE les nervis du système reprennent du service
Les lecteurs qui ont pris l'habitude de consulter le site voxnr.com, tant la première page que le forum ont pu constater que je n'ai pas varié dans mes prises de position politique. Anti-système j'étais, anti-système je reste. Ils ont pu également noter l'attention toute particulière que je porte à Nicolas Sarkozy en raison de son américanophilie non dissimulée ainsi qu'à la gauche suite à la rupture avec un projet d'essence sociale qui fut abandonné voilà presque un quart de siècle. Ni le petit homme de droite, ni la gauche, ne sont des alternatives aux maux dont souffre notre pays et plus généralement l'occident.

Le projet du CPE n'est en rien définitif. Il instaure une précarisation qui dans le cadre de l'économie libérale est certes un plus, mais qui va vite s'avérer insuffisante. Il faudra donc que les gouvernants aillent bien au delà s'ils souhaitent réellement participer à la course de longue haleine que nous impose la concurrence économique. Il leur faudra donc se délester des fardeaux qui pèse sur l'activité libérale. Ces surcharges pondérales sont bien connues des français et pour cause: ils y tiennent. Ils ont pour nom "retraite", "conditions de travail", "smic", "temps de travail", "sécurité sociale", etc... C'est tout cela que l'on est en train de jeter à la mer progressivement (ce qui est habile politiquement) de manière à ce que la pilule puisse passer. En conséquence, le CPE n'est pas une catastrophe en lui même, mais simplement le prolongement d'une politique qui se propose d'aller bien plus loin. Il en va de même pour le déremboursement des médicaments qui petit à petit s'accélère de façon à ce qu'un jour nous finirons tous par nous rendre compte que, la privatisation étant effectuée, il ne nous reste plus qu'à recourir à l'assurance.

Certaines classes d'âge ont connu leurs manifestations bien avant celles qui font l'actualité aujourd'hui. La gauche en a fait les frais suite à la défense de l'école privée en 1984 mais aussi suite à l'opposition des jeunes et enseignants à l'ami de Lionel Jospin qui n'était autre que Claude allègre ministre de l'éducation nationale de son état. La droite a du elle aussi passer sous les fourches caudines des vagues étudiantes. On peut songer à 1986 qui se clôtura par le retrait du projet Devaquet ou à l'ambition balladurienne du CIP qui ne connut pas de meilleur sort. En cela, le renvoi dos à dos de ce qui alternativement se nomme majorité ou opposition et que l'on persiste bien à tort à appeler gauche ou droite s'impose. Systématiquement, c'est un zéro pointé qui sanctionne de détestables copies gouvernementales.

La gauche et la droite rivalisent d'incompétence lorsqu'il s'agit de répondre aux légitimes aspirations des jeunes. Je crains que la motivation de ceux ci ne soit pas aussi importante que ce que l'on a coutume d'affirmer. En effet, un projet dit de gauche sera brocardé par les étudiants dits de droite et réciproquement. Or les jeunes, dans leur majorité ne croient plus à la politique. Cela explique que les grèves et blocages ne sont que le fait de minorités qu'elles soient de droite ou de gauche suivant l'époque. On pourrait se réjouir de l'attitude de l'étudiant représentatif qui attend que les événements se passent en considérant que cette inaction est la conséquence délibérée d'un choix, les politiques n'étant plus pris au sérieux. Malheureusement il n'en est rien. Il s'agit simplement d'une soumission à un système qui, parce que hédoniste, n'est pas sans avantages. Quitte, et trop tard, une fois arrivé sur le marché du travail à crier au scandale en découvrant les affres du chômage ou des conditions de travail. Ceux qui en revanche sont politisés sont ravis de l'aubaine. Ainsi, les manifestant de droite sont systématiquement qualifiés de fascistes. Au même titre que les manifestants de gauche sont affublés du qualificatif de stalinien ou autre nom d'oiseau. Je ne conteste pas le droit à la lutte contre le bolchevisme international ou la peste brune, chacun à l'évidence ayant droit à son dada. Je m'interroge sur l'existence et la survie de l'un comme de l'autre.

Pour ma part, je suis intimement convaincu que ces deux idéologies politiques ont disparu de l'espace politique français ou ne subsistent qu'à l'état résiduel. L'instrumentalisation de ces deux phénomènes politiques fait justement la joie d'un système bien satisfait que l'on ne pratique pas son analyse. C'est donc au monde libéral que rendent service les étudiants de gauche en soutenant leur joujou politique, tout comme c'est au même monde libéral que rendent service les étudiants de droite pour les mêmes raisons. Bien peu en ont conscience. Quand bien même le projet du CPE serait abandonné, une gauche victorieuse en 2007 le réhabilitera sous un nom et une forme différente. Aider l'opposition si ce n'est pas pour affaiblir le pouvoir est dans ce cas ridicule.

Peut être aussi faudrait t-il se pencher sur les réactions de la galaxie nationaliste que l'on inféode à tort ou à raison à l'extrême droite. Beaucoup ont suivi de très loin les émeutes de novembre, attitude qui nous a bien fait sourire si l'on tient compte de leurs propos bellicistes. Le conflit inter-ethnique ou la guerre civile n'ont pas eu lieu. Nous l'avions dit, écrit et nous avions raison. De la même façon, les émeutes étudiantes ne déboucheront pas sur le grand soir. Quand bien même, si tel était le cas, compte tenu du fait que les différentes orientations des membres du réseau radical convergent néanmoins vers une attitude résolument anti-système, nécessité pour nous serait de prendre le train en marche pour le diriger sur une voie conforme à nos idées. En cela, les manifestants en dépit de leur naïveté politique, s'ils ne sont pas nos amis ne sont pas non plus nos ennemis. On m'objectera peut être qu'ils nous considèrent eux comme la "frange la plus réactionnaire de la bourgeoisie". Peu nous importe, ce sont les mêmes qui, fustigeant le capital ou le mondialisme, ont voté Rocard puis Jospin et se préparent séduits à voter Ségolène. La cohérence n'est donc pas leur fort. Ils affaiblissent le gouvernement et c'est l'essentiel. Déplacé donc, d'être terrorisés ou de de s'attendre à l'établissement de kolkhozes.

Mai 68 et les parallèles douteux. La situation serait la même aux yeux de certains alors que le phénomène est tout à fait différent. Mai 68 n'est que l'événement marquant la rupture entre deux modèles sociétaux. Il ne fut pas la cause, mais la conséquence d'un état d'esprit. La grève était généralisée et cela dans des usines où le nombre d'ouvriers étaient importants. Qui imagine aujourd'hui Jacques Chirac obligé d'aller solliciter la fidélité de l'armée dans les circonstances actuelles ? Qu'une partie de ce que l'on appelle "extrême droite" se soit portée au secours du général De Gaulle est exact mais les enjeux étaient différents. Nous étions en pleine guerre froide (où sont les chars soviétiques ?), les communistes avaient le vent en poupe (combien aujourd'hui ?) et suite au choix de l'OAS certains avaient tout intérêt au ralliement. Ils en furent d'ailleurs récompensés.

Que nous donnerait l'actuel gouvernement si nous venions à le soutenir ? Absolument rien. Tout simplement parce qu'il n'a pas besoin de soutien. Et puis avouons le, parce qu'il sait très bien, que quoiqu'il advienne, nous ne le soutiendrons pas.



dimanche 12 mars 2006

Droite et gauche, des typologies obsolètes érigées en dogme

Dimanche, 12 Mars 2006
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Droite et gauche, des typologies obsolètes érigées en dogme

Philippe Delbauvre

Politique
Droite et gauche, des typologies obsolètes érigées en dogme
Il est une mode, que l’on rencontre de plus en plus fréquemment dans les milieux que les spécialistes traditionnellement classent à droite, qui consiste à se définir comme étant de gauche. Encore faudrait t-il définir la notion, ce qui n’est jamais effectué, enfin à tout le moins jamais de façon consensuelle. Bizarre, dans ces conditions que de vouloir impérativement appartenir à ce que qu’à l’ évidence personne ne connaît.

Peut être faudrait t-il effectuer un grand bon dans le temps : nous voici ainsi revenu aux années 1960 et 1970 où l’appartenance à la gauche – avec ses goulags – était le grand sésame qui permettait d’entrer dans les milieux très selects où l’on était d’office gratifié des qualités d’intelligence, d’ouverture d’esprit … et de visionnaire (sic).

Tout le monde a évidemment le droit de se tromper (même si à l’origine, l’homme de gauche avait par définition raison). « Ah l’autogestion ! » s’exclame encore aujourd’hui Cohn Bendit, « Ah les contradictions du capitalisme qui allaient le mener à l’échec », peut t-il dire lui aussi ou l’un de ses pairs.

Amusante toute cette rhétorique aujourd’hui, maintenant que nous bénéficions du recul.

Je ne leur en veux pas. Ils étaient jeunes, croyaient penser de façon autonome, alors qu’ils n’étaient que le fruit d’un déterminisme générationnel. Comme pour chaque classe d’âge, cela va de soi.

Ce qui m’embarrasse davantage, c’est qu’au moment où les sociologues reconnaissent que la France, mais aussi l’Europe ont davantage changé en vingt ans qu’en un siècle, beaucoup sont restés sur le quai de la gare, et à l’image de la vache dans son près, semblent soucieux d’attendre un train qui est déjà passé et ne passera plus. Un tel comportement pour les plus anciens peut se comprendre. En effet, il est d’autant plus difficile de renoncer à ce à quoi on a longtemps espéré que l’on y a cru longtemps. S’expliquent peut être là, l’âge moyen du militant du parti socialiste (52 ans) ou du parti communiste (?).

Là où cela devient inquiétant, c’est lorsque des jeunes, qui par définition, n’ont pu connaître sérieusement l’atmosphère des années 60 où à tout le moins des années 70 s’en viennent ressortir du réfrigérateur, que l’on avait éteint durant quelques semaines au retour de je ne sais quelles vacances intellectuelles, une assiette de viande crue devenue forestière, que la décence interdirait de donner à n’importe quel animal de compagnie.

A l’évidence, le désintérêt pour la gauche qui frappe le pays n’a pas été compris. Que l’on ait pu y croire en 1981 (« les 23 ans d’opposition »), c’est tout à fait logique, mais qu’aujourd’hui et ce après un quart de siècle de gestion du pouvoir partagée par alternance avec la droite, on ait pu conserver le même point de vue, cela montre que l’on est passé de la croyance à la foi.

Cela fait bien longtemps que j’ai laissé à ceux qui le souhaitaient le qualificatif de gauche. Pas mécontent de l’opération, et pour cause.

Il n’a plus de droite ou de gauche : leurs adeptes sont devenus des libéraux.

Voilà très exactement le nouveau clivage : les libéraux ou les autres.

Bien peu l’ont compris.