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dimanche 29 décembre 2013

Crime organisé : au sud de la France, l’État s’estompe, l’Italie s’annonce…

Entretien avec Xavier Raufer
Crime organisé : au sud de la France, l’État s’estompe, l’Italie s’annonce…



En parallèle de leurs trafics illégaux, des voyous investiraient légalement d’énormes sommes dans l’immobilier, au sud de la France. Argent noir, puis gris, et enfin blanchi ? Quelles conséquences sur notre économie ?

Situons d’abord le problème. En passant Aix-en-Provence vers le sud, le cadre étatique français, celui de la police, de la justice – plus généralement, des affaires – s’estompe et l’Italie s’annonce. Certes, les lois sont théoriquement identiques pour tout l’Hexagone et la République est une et indivisible, cependant… l’ambiance… les habitudes et les mœurs… Le voisinage monégasque aussi, où l’influence « napolitaine » est sensible. N’oublions pas la Corse : l’illicite du long de la Méditerranée sort du droit commun français.

D’abord, la discrétion ambiante et des dénégations officielles : « Marseille n’est pas Chicago ! ». Plus qu’ailleurs, la proximité des bandits est ici sensible. À lire les nouvelles, l’officiel, le journaliste constatent qu’on tue pas mal dans le coin. Même des avocats ou des élus ! D’où grande prudence. Les quotidiens locaux taisent ainsi longtemps les noms des bandits du cru, pour ne les citer qu’ultima ratio, quand ils sont durablement en prison – mieux encore, morts. Titre recommandé en pareil cas : « Le dernier parrain ». Ni original ni véridique, cet intitulé a nonobstant l’éminent mérite d’éluder le parrain suivant qui, lui, est libre et peut tuer…

Il y aurait donc comme un double langage dans le monde politico-médiatique…

Surtout, même si ce qui se dit avec insistance en privé est énergiquement nié en public – le Midi repose sur un terreau proto-mafieux inexistant ailleurs en France. Certains notaires à la coule ou avocats accommodants… Des commerces ou PME à la dérive rachetés à vil prix et transformés en « blanchisseuses ». Des élus « proches » de la pègre… Des boîtes de nuit plastiquées… Et la « politique de la ville » vantée par divers Tartuffes ou niais, qui finance en fait des nervis servant de colleurs d’affiches et d’agents électoraux, quand ils n’opèrent pas plus virilement pour « décourager » des politiciens rivaux…

De quoi désespérer, donc ?

Avant d’arrêter pour épargner le lecteur, mentionnons encore des loges maçonniques dévorées par l’affairisme. Dans cette pittoresque catégorie, le lecteur curieux pourra rechercher « Marcel la Salade » sur un moteur de recherche – un cas entre cent. « Marcel la Salade » ! Même Pagnol n’aurait pas osé…

Additionnons : le climat… les réseaux… les ripoux…les nervis… des politiciens glauques… les bandits… certains flics (pas tous de base) ayant, comme on dit, « perdu leurs repères » … les cités hors contrôle… les trafics avec le Maghreb… des chantages aux mœurs… et vous avez la réponse à votre question. Pour tout personnage louche, tenté par les investissements créatifs et l’immobilier acrobatique, le Sud de la France, notamment la côte, tend à dégager un irrésistible fumet d’affairisme. En plus, il y fait beau et le voisinage y est sympa et chaleureux, alors…

Conséquences ? Soyons réalistes : elles sont plutôt bénéfiques et chacun, régionalement, y trouve son compte – du moins à court terme. Car la corruption est une gangrène d’autant plus pernicieuse qu’à regarder le léopard méridional, rien n’y distingue d’emblée les taches corrompues du pelage sain. Mais corruption il y a – et grave. Souvenons-nous de certaines promesses officielles de « nettoyer les écuries d’Augias » marseillaises, en 2012. Nous voici fin 2013 : il semble que ledit nettoyage soit plus facile à énoncer qu’à réaliser…